Le climatologue Hervé Le Treut appelle, dans une tribune au « Monde », à réfléchir à la gestion à long terme des territoires.Vendredi 27 juillet au soir, la Lune totalement éclipsée et l’éclatante planète Mars à l’opposition sont visibles côte à côte à l’œil nu, au sud-est du ciel.
La pleine lune qui se lève vers le sud-est le vendredi 27 juillet au moment du coucher du Soleil est en partie cachée par l’ombre de la Terre, l’ambiance lumineuse devrait donc être comparable à celle de cette image prise avec un puissant téléobjectif en août 2017, non loin de Marseille (revoir cette vidéo). Mais l’éclipse de l’année dernière n’était que partielle, alors que, cette fois-ci, la Lune va plonger totalement dans l’ombre terrestre et nous présenter une profonde teinte cuivrée. En outre, une heure après le départ du Soleil, dans un ciel crépusculaire déjà sombre, le point extrêmement brillant de la planète Mars sera magnifique juste à côté de la Lune totalement éclipsée : un spectacle céleste superbe !
C’est beau, rare, facile à observer à l’œil nu et sans aucun danger ! Vendredi 27 juillet, juste après le coucher du Soleil en Europe, regardez vers le sud-est et repérez la pleine lune qui se lève majestueusement. Le ciel est encore vivement éclairé par le crépuscule, mais vous pouvez déjà remarquer que la lune est différente : il en manque un gros morceau ! Dans l’espace, le Soleil, la Terre et la Lune sont sur le point de s’aligner presque parfaitement et le disque lunaire s’enfonce progressivement dans l’ombre de la Terre. À 21 h 30 min, heure de Paris (temps universel + 2 heures), la pleine lune est totalement plongée dans le cône d’ombre de notre planète et sa face présente une magnifique coloration cuivrée (voir l’explication plus bas). Notre satellite se situe alors à moins de 10° de hauteur, vous devez donc choisir un site d’observation avec un horizon bien dégagé autour du sud-est ; estimez la hauteur avec votre poing bras tendu qui cache à peu près 10° sur le ciel.
Cette scène est déjà superbe et inhabituelle – la dernière éclipse totale de Lune visible en France métropolitaine remonte au 28 septembre 2015 – mais le clou du spectacle est encore à venir. À 22 h 20 min, dans un ciel devenu bien plus sombre et alors que la pleine lune arrive au plus profond de l’ombre terrestre, le point éclatant orangé de la planète Mars est visible à 6° en dessous d’elle. Cette planète est à l’opposition et elle brille comme jamais au cours de ces quinze dernières années (voir ce billet). Elle aussi est alignée avec le Soleil et la Terre, mais elle se situe à près de 58 millions de kilomètres de nous, donc bien au-delà de l’extrémité de l’ombre de notre planète.
Dans un ciel dégagé, après une journée de forte chaleur, l’effet de ces deux astres aux reflets cuivrées plus ou moins intenses, côte à côte au-dessus de l’horizon sud-est, devrait être vraiment impressionnant. Pas impressionnant dans le sens effrayant, mais impressionnant esthétiquement et émotionnellement, impressionnant par la force des souvenirs que vous conserverez de cette rencontre céleste. À partir de 23 h 13 min, après 1 heure et 43 minutes de totalité – la plus longue du siècle, voir plus bas –, le disque lunaire commence sa sortie de l’ombre terrestre. La plus belle phase de l’éclipse s’achève, mais je vous suggère de rester encore un moment dehors pour apprécier l’intensité exceptionnelle de l’éclat martien qui reste parfaitement visible malgré l’augmentation considérablement de la luminosité lunaire. À 0 h 19 min, le 28 juillet donc, la pleine lune est intégralement hors de l’ombre et elle n’y retournera pas avant le 21 janvier à l’occasion de sa prochaine éclipse totale qui sera également observable en Europe.
Pour aller un peu plus loin :
Au fait, c’est quoi une éclipse de Lune ?
Où peut-on voir l’éclipse de Lune du 27 juillet dans le monde ?
Les horaires précis de l’éclipse totale de Lune du 27 juillet 2018
Comment observer une éclipse de Lune ?
Cette pleine lune éclipsée sera la plus petite de l’année !
Les couleurs des éclipses lunaires
La plus longue du siècle ?
Au fait, c’est quoi une éclipse de Lune ?
Une éclipse totale de Lune se produit lorsque la pleine lune traverse l’ombre de la Terre et n’est plus éclairée directement par le Soleil. La Lune tourne autour de la Terre en parcourant une orbite inclinée de 5,1° par rapport au plan de l’orbite de la Terre autour du Soleil. Cette inclinaison est importante, car elle limite drastiquement le nombre d’éclipses lunaires que nous pouvons voir. Une éclipse ne peut en effet se produire qu’au moment de la pleine lune, lorsque notre satellite se situe à l’opposé du Soleil par rapport à la Terre. Éclairée par l’astre du jour, la Terre possède une ombre qui s’étire sous la forme d’un cône sur moins de deux millions de kilomètres dans le plan de son orbite. Si la pleine lune se produit à un moment où notre voisine circule au-dessus ou en-dessous de ce plan, ce qui est le cas le plus fréquent, elle ne peut pas traverser l’ombre terrestre et il n’y a pas d’éclipse. Une éclipse totale de Lune ne se produit donc que lorsque la pleine lune circule à hauteur – ou à proximité immédiate – du plan de l’orbite de la Terre que l’on nomme « plan de l’écliptique » puisque c’est le plan dans lequel se produisent les éclipses.
L’ombre conique de la Terre se développe sur un peu moins de deux millions de kilomètres à l’opposé du Soleil. Elle est entourée par une zone de pénombre qui correspond aux endroits d’où le disque solaire apparaît partiellement caché par le limbe de notre planète. Lors d’une éclipse totale de Lune, notre satellite naturel traverse d’abord la pénombre, ce qui amoindrit légèrement son éclat, puis s’enfonce dans l’ombre, qui est plus ou moins colorée en rouge par le rayonnement solaire filtré et réfracté par l’atmosphère terrestre.
Crédit : NASA
Où peut-on voir l’éclipse de Lune du 27 juillet dans le monde ?
En France métropolitaine, la boule lunaire qui apparaît au ras de l’horizon sud-est au coucher du Soleil est d’autant plus couverte par l’ombre de la Terre que vous vous situez à l’ouest du pays. Au-delà d’une ligne Bayonne-Lille, elle est même déjà entièrement éclipsée quand elle se lève. Le meilleur endroit de la planète pour voir cette éclipse est l’île de La Réunion, où la Lune est au zénith en pleine nuit au milieu de la totalité. La Lune se couche au début de la totalité en Nouvelle-Calédonie. Aux Antilles, seule une éclipse par la pénombre est observable et, en Polynésie française, le phénomène n’est pas visible, tout comme en Amérique du Nord.
Ce schéma montre les régions du globe qui sont concernées par l’éclipse. Les chiffres renvoient aux instants suivants : 1 = entrée dans la pénombre ; 2 = entrée dans l’ombre ; 3 = début de la totalité ; 5 = fin de la totalité ; 6 = sortie de l’ombre ; 7 = sortie de la pénombre. La courbe associée à chacun de ces chiffres indique les régions à partir desquelles on peut voir ces instants lors du lever ou du coucher de notre satellite. Si, par exemple, vous vous trouvez à l’ouest (à gauche) d’une de ces courbes dans la partie « éclipse au lever de la Lune », l’instant qu’elle concerne se produit juste avant le lever de la Lune et vous ne pouvez pas l’observer ; si vous vous situez à l’est, en revanche, l’instant se produit juste après le lever de notre satellite et vous l’observez au ras de l’horizon.
© Guillaume Cannat d’après le logiciel Lunar Eclipse Maestro de Xavier Jubier.
Les horaires précis de l’éclipse totale de Lune du 27 juillet 2018
Le schéma ci-dessous vous montre la trajectoire de la Lune à l’intérieur de la pénombre et de l’ombre de la Terre lors de l’éclipse totale du vendredi 27 juillet 2018. Le diamètre du cône d’ombre de la Terre à la distance de la Lune lors de cette éclipse est de 9 200 kilomètres ; le diamètre équatorial de la Lune est de 3 476 kilomètres. Les chiffres signalent les principales étapes de ce rendez-vous. Si vous n’êtes pas en France métropolitaine, convertissez les horaires en temps en temps universel et appliquez votre décalage horaire :
© Guillaume Cannat d’après le logiciel Lunar Eclipse Maestro de Xavier Jubier
Horaires en heure légale d’été pour la France métropolitaine (temps universel + 2 h)
1 Entrée dans la pénombre à partir de 19 h 14 min
2 Début de l’entrée dans l’ombre à 20 h 24 min
3 Début de la totalité à 21 h 30 min
4 Milieu (maximum) de la totalité à 22 h 21 min
5 Fin de la totalité (début de la sortie de l’ombre) à 23 h 13 min
6 Fin de la sortie de l’ombre à 0 h 19 min, le 28 juillet
7 Sortie de la pénombre jusqu’à 1 h 28 min
Le vendredi 27 juillet 2018, le Soleil se couche à 20 h 59 min à Nice, 21 h 13 min à Montpellier et à Strasbourg, 21 h 34 min à Bordeaux, 21 h 36 min à Paris, 21 h 40 min à Lille, 21 h 59 min à Quimper. La Lune se levant quelques minutes avant le coucher du Soleil, l’entrée dans la pénombre et tout ou partie de l’entrée dans l’ombre ne sont pas visibles en France métropolitaine.
Comment observer une éclipse de Lune ?
L’observation d’une éclipse totale de Lune ne présente aucun danger pour votre vue. Vous pouvez donc l’admirer autant que vous le désirez à l’œil nu, aux jumelles ou avec des instruments optiques plus puissants, lunettes ou télescopes. Il est important de souligner que, durant pratiquement toute la phase qui voit le disque lunaire s’enfoncer progressivement dans l’ombre ou en sortir, et qui dure près d’une heure, la coloration cuivrée de la surface lunaire n’est pas visible à l’œil nu car la zone non éclipsée est trop éblouissante. Si vous utilisez des jumelles, une lunette ou un télescope, en revanche, ou si vous photographiez la Lune, les teintes cuivrées typiques apparaissent à partir du moment où le disque lunaire est éclipsé à plus de 30-40 %.
Déjà spectaculaire à l’œil nu, l’observation d’une éclipse lunaire devient somptueuse dans un instrument car le grossissement permet de détailler la progression de l’ombre d’un cratère à l’autre et de guetter les variations de teintes qui peuvent apparaître tout au long du phénomène. Le liseré bleu-vert engendré par la couche d’ozone en périphérie de l’ombre est particulièrement beau durant les premières et les dernières minutes de la totalité, lorsque le bord lunaire n’est plus éblouissant.
Si vous n’avez pas d’instrument, rendez-vous sur les sites organisés par les associations pour profiter des jumelles, lunettes ou télescopes qui seront mis à votre disposition. Vous bénéficierez en plus des explications de nombreux animateurs scientifiques.
Cette pleine lune éclipsée sera la plus petite de l’année !
Notre satellite circule en effet actuellement à sa distance maximale de la Terre, à plus de 406 000 kilomètres, son diamètre apparent est donc inférieur à 0,5 degré. C’est la plus petite, mais cela ne l’empêchera sûrement pas d’être la pleine lune la plus regardée de l’année…
Les couleurs des éclipses lunaires
L’un des aspects les plus spectaculaires de l’observation d’une éclipse totale de Lune est l’apparition de couleurs sur la face habituellement éblouissante et grise de notre voisine. Bien évidemment, ces colorations ne sont pas le reflet de changements physiques des matériaux qui parsèment la surface sélène ; il s’agit simplement de la projection sur la face lunaire des variations de couleurs subies par la lumière du Soleil lorsqu’elle traverse l’atmosphère terrestre.
La périphérie de l’ombre est colorée par les rayons solaires filtrés et réfractés par la haute atmosphère et peut donc présenter une grande variété de teintes comme le jaune, l’orangé, le vert ou le bleu – ces deux dernières étant générées par la réfraction de la lumière solaire par la couche d’ozone située entre 18 et 25 km d’altitude. Le centre du cône d’ombre, en revanche, doit sa coloration aux rayons solaires qui traversent la basse atmosphère et sont donc plus fortement réfractés.
De la même manière que les crépuscules peuvent exhiber des colorations intenses ou pratiquement inexistantes en fonction de la couverture nuageuse ou de la présence de poussières et d’aérosols d’origine volcanique dans l’air, la coloration du centre de l’ombre de notre planète dépend largement de l’état de la basse atmosphère sur le pourtour terrestre tel que le verrait une personne installée sur la Lune lors de la totalité. Il faut insister sur l’importance que peut jouer la distance Terre-Lune au moment de l’éclipse. Si la Lune se trouve à l’apogée – au plus loin de notre planète –, elle passe plus près du sommet du cône d’ombre et présente en général une teinte plus vive que lorsque l’éclipse se déroule au périgée.
Il y a quelques décennies, l’astronome français André Danjon a établi empiriquement une échelle de mesure de la luminosité des éclipses totales de Lune. Attendez le milieu du phénomène, lorsque la Lune est au cœur de l’ombre, pour relever votre mesure à l’œil nu ou avec un instrument optique. L’éclipse du 27 juillet 2018 devrait être très sombre car notre satellite s’enfonce très profondément dans l’ombre terrestre, mais sa grande distance pourrait atténuer légèrement cet assombrissement.
Échelle de Danjon
0 = éclipse très sombre, la Lune est pratiquement invisible au maximum.
1 = éclipse sombre, grise ou brune, les détails lunaires sont difficilement perceptibles.
2 = éclipse rouge foncé ; le centre de l’ombre est très sombre, la zone périphérique est un peu plus claire.
3 = éclipse rouge brique ; le bord de l’ombre est d’un gris-jaune assez clair.
4 = éclipse brillante avec une teinte cuivrée ou orangée ; la bordure est bleutée et très lumineuse.
La plus longue du siècle ?
Avec une totalité durant pratiquement 103 minutes, seulement quatre minutes de moins que le maximum théorique, il s’agit effectivement de la plus longue éclipse totale de Lune du 21e siècle. Au 20e siècle, seules les éclipses du 6 juillet 1982 (105,7 minutes) et du 16 juillet 2000 (106,4 minutes) furent plus longues et il faudra attendre le 9 juin 2123 pour observer une totalité plus longue que celle du 27 juillet 2018 : 106,1 minutes. Cela précisé, je signale tout de même que l’éclipse du 26 juin 2029 aura une totalité de 102 minutes ce qui est vraiment très proche de celle du 27 juillet 2018.
Pour conclure, je vous engage à lire l’excellente BD éducative mise en ligne par Sylvain Rivaud alias Lepithec, auteur de bandes dessinées et illustrateur. Passionné du ciel depuis tout petit, il est astronome amateur et nous avait déjà proposé d’excellentes BD sur l’éclipse de Soleil de 2015 et sur celle de 2017.
Source : Le Monde