Nantes : la mort d’un jeune, tué par la police, embrase trois quartiers sensibles

Un conducteur de 22 ans, refusant d’obtempérer lors d’un contrôle de police, est mort mardi soir après avoir été blessé par balle.

Son décès a provoqué des violences urbaines dans trois quartiers sensibles de la ville. Un jeune homme de 22 ans est mort mardi soir à Nantes après avoir été touché par balle par un policier. Selon des sources policières, le jeune aurait été blessé à la carotide et serait décédé à son arrivée à l’hôpital. «Le SRPJ de Nantes et l’Inspection générale de la police nationale sont saisis de l’enquête afin de préciser la commission des faits et déterminer dans quelles circonstances le policier a été amené à faire usage de son arme», a précisé à l’AFP le procureur de la République de Nantes, Pierre Sennès.

Les faits se sont déroulés vers 20h30 lors d’un «contrôle diligenté par un équipage de CRS suite à des infractions commises par un véhicule», a déclaré sur place à la presse Jean-Christophe Bertrand, directeur départemental de la Sécurité publique (DDSP). L’identité de l’automobiliste n’étant «pas claire, les CRS ont reçu pour ordre de ramener le conducteur» au commissariat. «Le conducteur, faisant mine de sortir de son véhicule, a percuté un fonctionnaire de police» qui a été légèrement blessé aux genoux, a indiqué le DDSP. «Un de ses collègues a fait feu et a touché le jeune homme qui est malheureusement décédé.»

La victime était sous le coup d’un mandat d’arrêt délivré en juin 2017 par un juge d’instruction de Créteil, a indiqué mercredi à l’AFP le procureur de la République de Nantes Pierre Sennès. Il était recherché pour vol en bande organisée, recel et association de malfaiteurs, a précisé le procureur. «Ce jeune-là, il avait tout le temps le sourire. C’est ça qui le caractérisait. Il n’était pas dans les embrouilles. C’était une crème. On a perdu un ami, on a perdu un frère», explique à Ouest-France un habitant du Breil. les habitants remettaient fortement en question la version de la police. Une femme assure à l’AFP qu’il n’y avait «pas de CRS derrière la voiture, il n’a écrasé personne. Il y a eu un seul coup de feu». Une autre assure qu’il «était à l’arrêt» et «a donné ses papiers».

Une mairie annexe incendiée

Le tir du policier a aussitôt déclenché des violences urbaines dans le quartier avec des «prises à partie, des jets de cocktail Molotov», selon le procureur de la République. Des voitures ont été incendiées, ainsi qu’un centre paramédical situé dans un centre commercial. Ce drame a été aussi «le point de départ d’autres violences urbaines sur d’autres quartiers sensibles de Nantes», à Malakoff et aux Dervallières, précise Jean-Christophe Bertrand. Dans ce dernier quartier, la mairie annexe et la maison de la justice et du droit situés dans le même bâtiment ont été touchés. La situation semblait apaisée peu avant 3 heures dans les trois quartiers touchés par les violences. Près de 200 policiers sont mobilisés, a indiqué le directeur départemental de la Sécurité publique.

«Mes premières pensées vont à ce jeune homme mort, à sa famille, à tous les habitants de ce quartier, de nos quartiers», a déclaré dans la nuit la maire de Nantes, Johanna Rolland. «La police et la justice dans son indépendance devront faire la clarté et la plus totale des transparences sur ce qui s’est passé ce soir.» «Tous les moyens nécessaires sont actuellement mobilisés, et le seront le temps qu’il faudra, pour apaiser la situation et prévenir tout nouvel incident», a de son côté assuré Gérard Collomb, lors d’un entretien avec l’élue. Dans ce même communiqué, le ministre de l’Intérieur a condamné «avec la plus grande fermeté» les heurts de la nuit.

Lors de la présentation de son rapport 2017, l’IGPN avait la semaine dernière mis en lumière une plus grande utilisation de certaines armes par les policiers, comme le pistolet automatique, avançant pour la première fois le chiffre des personnes tuées ou blessées lors d’interventions policières, avec 14 tués recensés depuis juillet 2017. Selon la cheffe de l’IGPN Marie-France Monéger-Guyomarc’h, cette augmentation des usages d’arme trouve son origine dans l’augmentation «préoccupante» du nombre de conducteurs refusant les contrôles, et non dans un assouplissement des règles encadrant la légitime défense.

source : Le Figaro