Vidéo : deux femmes harcelées dans un parc aquatique du Bahreïn

Attouchements, remarques graveleuses, intimidations : le 3 août dernier, dans un parc aquatique du désert de Bahreïn, deux femmes se sont fait harceler en plein milieu d’une piscine. La scène a relancé les débats sur la nécessité d’une loi interdisant le harcèlement sexuel.

La vidéo dure dix secondes et a été filmée dans le parc aquatique « Lost Paradise of Dilmun Water Park”, le 3 août dernier. On peut apercevoir deux femmes agressées par une dizaine d’individus dans une piscine. Les hommes les encerclent, leur font des remarques sur leur maillot de bain et les touchent à plusieurs reprises en attrapant leurs bikinis. Ces dernières essayent de se débattre et d’échapper aux mains de leurs harceleurs, sans succès.
La vidéo a été relayée des dizaines de milliers de fois sur Twitter et Instagram, la plupart des internautes appelant à l’ouverture d’une enquête.

Traduction : « Aux personnes qui déclarent que c’est la faute d’une femme si elle est harcelée sexuellement, à cause de ses habits, je vous assure que même les femmes entièrement couvertes sont victimes de harcèlement. »

 


Traduction: « Aux personnes qui déclarent que c’est la faute d’une femme si elle est harcelée sexuellement, à cause de ses habits, je vous assure que même les femmes entièrement couvertes sont victimes d’harcèlement. »

 

Traduction : « C’est officiel. Boycottons Lost Paradise après leur communiqué de presse. »

« Les deux femmes se sont mises dans une situation risquée »

Face à la polémique, le complexe touristique a réagi, déclarant “assurer la sécurité des vacanciers présents au sein de la propriété”. D’après un article du journal en ligne “Gulf Daily News”, le complexe serait équipé de plus de 160 caméras de surveillance permettant “de contrôler toutes les dérives possibles”. Il dispose également de 65 employés responsables de la sécurité du parc. Selon le journal, une équipe de surveillants serait intervenue dans la piscine pour mettre fin à l’agression.

Le responsable du complexe touristique, en charge du parc aquatique, a d’ailleurs déclaré dans un communiqué, qu' »il ne s’agissait pas d’un acte de harcèlement sexuel”, expliquant :

Les femmes présentes dans le parc aquatique avaient été conseillées de ne pas fréquenter les piscines bondées. Les deux femmes ont donc clairement choisi de se baigner dans une piscine fréquentée par des célibataires, et se sont donc mises dans une situation risquée.”

Les deux victimes saoudiennes n’ont pas déposé plainte mais une enquête a été ouverte en coopération avec le ministère de l’Intérieur afin de tirer l’affaire au clair. À la suite de cette enquête, les agresseurs ont reçu un avertissement.

Contacté par la rédaction des Observateurs de France 24, le parc aquatique “Lost Paradise of Dilmun Water Park” n’a pas donné suite à nos questions. Nous publierons sa réponse si elle nous parvient.

“Au royaume bahreïni, si tu es harcelée, c’est que tu l’as cherché”

S. Yousif Almuhafdah est un activiste de l’organisation des droits de l’Homme “Bahrain Human Rights”. Pour lui, cette vidéo illustre l’impunité des harceleurs à l’intérieur du royaume.

Ce n’est pas la première fois que cela arrive. De nombreuses affaires de ce genre ont lieu dans les lieux publics comme les hôtels, les restaurants, les parcs… et très souvent le personnel ferme les yeux. Dans ce cas précis, l’incident a été filmé et largement diffusé, obligeant le complexe à réagir car il tient à sa réputation internationale, et est habitué à recevoir des vacanciers venus de tous les pays du Golfe.
Mais on voit bien que les individus ne se sont pas privés de le faire dans un lieu public, en face de surveillants. Car ils savaient pertinemment que rien ne leur serait reproché. Au Bahreïn, la mixité est autorisée dans les espaces publics et il n’y a pas de loi obligeant le port du voile. Mais il n’y a pas de loi interdisant le harcèlement sexuel.”

« Au lieu de poursuivre la bande de harceleurs, ils décident de blâmer les victimes »

Selon notre Observateur, le Code pénal ne s’attaque pas suffisamment à la violence à l’égard des femmes. Il n’existe en effet aucune disposition relative au harcèlement sexuel ou à la violence domestique. Par ailleurs, si le viol peut être puni d’une peine d’emprisonnement à perpétuité, le viol conjugal n’est pas reconnu comme un crime.

Les garçons se sentent surpuissants, et les réactions des autorités vont toujours dans leur sens car au lieu de poursuivre la bande de harceleurs, ils décident de blâmer les victimes pour avoir décidé de se baigner dans une piscine remplie d’hommes. Face à ces mentalités, les victimes ne déposent jamais plainte, et même si elles le faisaient, elles ne pourraient obtenir de suivi. Au royaume bahreïni, si tu es harcelée, c’est que tu l’as cherché.”

Militer pour les droits de l’Homme est un combat risqué au Bahreïn. Plus d’une vingtaine d’activistes risquent aujourd’hui la peine de mort.

Source : http://observers.france24.com